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AC — 63 — AC


Achapt,

subst. masc. Rachat. Achat.

On peut regarder ces deux significations comme des extensions de la signification particulière d'ACAPIT ou ACAPTE ci-dessus, dont le mot Achapt, et ses autres orthographes paroissent avoir été formés ; nous ne le trouvons employé que sous la première, dans le sens de rachat. " Si aucun possesseur d'aucune maison ou autres héritages.... chargé d'aucune rente foncière, acapte.... laditte rente, icelle rente demeure.... estainte, et après ledit Achapt, etc. " (Cout. gén. T. II, p. 879. - Voy. ACHAPTER ci-après.)

Dans le sens générique et subsistant de notre mot Achat, cette orthographe paroit être plus ancienne que celle d'Achet, formée sans doute du verbe Acheter, le même qu'ACHAPTER ci-après. On lit, art. 155 des établissemens de St-Louis, faits en 1270 : " Se il avenoit que aucuns achetast, et un autre du lignage li demandast l'achat, et li offrist les deniers à rendre que li achas li auroit cousté, etc. " (Ord. T. I, p. 235. - Voy. ACHAPTURE et ACHETEMENT ci-après.)

Il paroit que par Lettres de l'achat du marché, il faut entendre l'expédition de l'Acte, par lequel on donnoit à ferme certaines impositions. " Ne seront tenuz les acheteurs.... payer au... Receveur ne à son député pour les Lettres de l'achat du marchié, que douze deniers, et pour la quittance du payement, que six deniers tournois. " (Ord. T. III, p. 680.)

On disoit au figuré :

Cuidiés-vous que je soie vuis, De durs jours et de poures nuis ? Nennil ; j'en ai bien quatre muis De bon acat.

Froiss. Poës. MSS. p. 114, col. 1.

PROVERBES

Cas en sac, si est mauvais acas.

Anc. Poës. Fr. MS. du Vat, n° 1490, fol. 149, V°.

Nous disons encore " acheter chat en poche, " pour faire marché d'une chose sans la connoitre et sans la voir.

VARIANTES :

ACHAPT. Bourgoing. de Orig. voc. vulg. p. 22, R°.

ACAS. Anc. Poës. Fr. MS. du Vat. n° 1490, fol. 149, V°.

ACAT. Froissart, Poës. MSS. p. 114, col. 1. - Laur. Gloss. du Dr. fr. - Du Chesne, Gén. de Béth. preuv. p. 164, tit. de 1246.

ACHAS. Ord. T. I, p. 235.

ACHAT. Orthog. subsist.

ACHATE. Littleton, Gloss. de M. Hoüard. - Rymer, T. I, p. 45, tit. de 1259.

ACHEPT. Cretin, p. 203.

ACHET. Nicot et Monet, Dict. - Nuits de Strapar. T. I, p. 50 et 198.

Achapter,

verbe. Racheter. Acheter.

Du Cange et Ménage, font venir ce verbe du latin Accaptare formé d'Accapitum ; en françois ACAPIT, ACAPTE. (Voyez ces mots ci-dessus.)

Plusieurs de ces orthographes portent en effet des marques sensibles de cette origine, sur-tout celle d'Acapter, sous laquelle ce mot signifie racheter, faire un rachat ; proprement racheter une rente dont le payement étoit une espèce d'acapit, ou reconnoissance faite au Seigneur, dont le vassal tenoit un héritage à titre d'inféodation. " Se aucun possesseur d'aucune maison ou autres héritages.... chargé d'aucune rente foncière, acapte.... ou retraict laditte rente ; icelle rente demeure sopite et estainte ; et après ledit achapt laditte maison et héritage qui tenue estoit en la ditte rente achaptée, sera tenue du Seigneur dont laditte rente vendue estoit tenue. " (Cout. gén. T. II, p. 879.)

Ce passage prouve qu'achapter est le même que le verbe acapter. On disoit au même sens, quoique figurément, achater ou acheter un crime, pour en payer la peine, le racheter. (Hist. des 3 Maries, en vers MS. p. 35, 236 et 237.)

Toutes ces orthographes, même celle d'acheter qu'on retrouve dans le 1er Vol. des Ordon. p. 235-687, etc. sont donc des variations occasionnées par les différentes manières de prononcer le même mot. La prononciation rude d'achapter s'adoucit dans Achater. Le son ouvert de l'a devient sourd s'il est prononcé rapidement. De là les orthographes Achepter, Acheter. Le Glossaire fournira mille exemples de ces sortes de changemens.

Par une extension naturelle de l'acception racheter, achapter signifioit acheter. (Voy. Molinet, p. 167. - Saintré, p. 143. - Rabelais, T. IV, Anc. Prolog. p. 26, etc.) Les Picards disent encore Acater comme dans ces vers :

.... je ne sai feme acater Pour ce si me sui trais en sus.

Anc. Poës. Fr. MS. du Vatie, n° 1490, fol. 39, R°.

Amours n'achate ne vent.

Ibid. fol. 42, V°.

PROV.

Qui tant l'aime, tant l'achette.

Eust. des Ch. Poës. MSS. fol. 426, col. 1.

Qui plus l'acate, millor l'a.

Ph. Mouskes, MS. p. 242.

CONJUG.

Acatet, partic. Acheté. (Carpentier, Hist. de Cambrai, p. 31, tit. de 1266.)

Acatissiés, imp. subj. Achetassiés. (Fabl. MS. du R. n° 7989, fol. 212, R° col. 1.)

Acharad. Lisez Achatad. Prétér. Acheta. En latin Emit. (Loix Norm. Art. 25.)

Achat, subj. prés. Achete, en latin Emat. (Loix Norm. Art. 43.)

Achatet, subj. prés. Achete, en latin Emat. (St Bern. Serm. fr. MSS. p. 289.)

Achatissiez, imp. subj. Achetassiez. (Fabl. MS. du R. n° 7218, fol. 333, V° col. 1.)

Achetaient, subj. prés. Achetent, en latin Emant. (Ord. T. II, p. 16, col. 2, Art. 6.)

VARIANTES :

ACHAPTER. Bourgoing. Orig. voc. vulg. fol. 22, R°. - Joinv. p. 55. - Rab. T. II, p. 258.

ACAPTER. Cout. gén. T. II, p. 879.

ACATER. Du Chesne, Gén. de Guines, p. 283, tit. de 1241.

ACHATER. S. Bern. Serm. fr. MS. p. 289. - Joinville, p. 25. Ord. T. I. p. 785.