Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/262

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aller chercher : J'avais jugé, par la lettre que vous aviez écrite à don Olmond, que vous ignoriez les changements qui étaient arrivés ; je leur donnai ordre de ne vous rien dire de l'état de la cour et de mes sentiments, et j'imaginai un plaisir extrême à vous apprendre l'un et l'autre. Quelques jours après, don Olmond partit aussi pour vous aller chercher et il crut qu'il vous trouverait plus tôt que ceux que j'y avais déjà envoyés. Nugna Bella me parut touchée d'une grande joie, par l'espérance de vous revoir ; mais son père, que j'avais reconnu pour souverain aussi bien que le vôtre, envoya demander à la reine la permission de la rappeler auprès de lui. Quelque douleur qu'elles eussent de cette séparation, Nugna Bella ne put l'éviter ; elle partit et, sitôt qu'elle a été arrivée en Castille, son père l'a mariée, contre son gré, à un prince allemand que la dévotion a attiré en Espagne. Il a cru voir dans cet étranger un mérite extraordinaire et l'a choisi pour lui donner sa fille ; peut-être a-t-il de la valeur et de la sagesse, mais son humeur et sa personne ne sont pas agréables, et Nugna Bella est très malheureuse.

— Voilà, dit le roi en finissant son discours, ce qui s'est passé depuis votre éloignement ; si vous n'aimez plus Nugna Bella et que vous n'aimiez encore, je n'ai rien à souhaiter, puisque vous serez aussi heureux que vous l'avez été et que je le serai entièrement par le retour de votre amitié.

— Je suis confus, seigneur, de toutes vos bontés, répondit Consalve, je crains de ne vous pas faire assez paraître ma reconnaissance et ma joie, mais l'habitude que mes malheurs et la solitude m'ont donnée à la tristesse, m'en laissent encore une impression