Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/284

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cette femme le quitta et vint s'asseoir avec une autre, proche du lieu où j'étais. Elles parlaient assez haut, mais je n'entendais pas ce qu'elles disaient, parce qu'elles parlaient une langue que je ne connais point et qui n'est pas celle des Arabes.

Elles nommèrent plusieurs fois Alamir et, quoiqu'elles fussent tournées en sorte que je ne pouvais voir leur visage, il me sembla que celle qui avait parlé à ce prince pleurait extrêmement. Enfin elles s'en allèrent, j'entendis marcher des chariots et beaucoup de chevaux du côté de Talavera. J'éveillai mon camarade, nous reprîmes notre chemin et nous vîmes de loin Alamir couché au pied d'un arbre, comme un homme qui se trouvait mal. Son écuyer me demanda s'il pourrait arriver de jour au camp des Arabes, je lui dis que non et ils ont passé la nuit dans le même village que nous.

Le roi se repentit d'avoir fait parler ces officiers et, sitôt qu'ils furent retirés :

— Vous voyez, seigneur, dit Consalve, si j'ai eu tort de croire qu'Alamir avait vu Zayde. Mais trouvez-vous possible qu'elle soit sortie de Talavera, répondit le roi, puisqu'elle y est prisonnière ?

— Mon malheur, répliqua Consalve, ne me laisse pas manquer aux choses qui me peuvent nuire. J'ai donné ordre, en partant, que Zayde eût la liberté de se promener hors de la ville toutes les fois qu'elle le voudrait, elle attendait Alamir dans ce bois. Il avait raison de me mander qu'une affaire importante, qui ne regardait point la guerre, l'empêchait de s'arrêter dans ce camp. Il la vit donc hier, elle pleurait après l'avoir quitté, il est donc vrai que Zayde aime Alamir, et il ne me reste plus d'incertitude. Laissez-moi mourir,