Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/379

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avait soutenu la vie pendant quelque temps, se trouva enfin si affaibli que les médecins désespérèrent de sa guérison. Félime était avec Zayde et Consalve lorsqu'on leur vint dire qu'un écuyer de ce malheureux prince demandait à parler à Zayde. Elle rougit et, après avoir été quelque temps embarrassée, elle le fit entrer et lui demanda tout haut ce que souhaitait le prince de Tharse. Mon maître est près d'expirer, madame, répondit-il, il vous demande l'honneur de vous voir avant que de mourir, et il espère que l'état où il est vous empêchera de lui refuser cette grâce. Zayde fut touchée et surprise du discours de cet écuyer, elle demeura, quelque temps sans répondre, enfin elle tourna les yeux du côté de Consalve, comme pour lui demander ce qu'il désirait qu'elle fit, mais, voyant, qu'il ne parlait point et jugeant même par l'air de son visage, qu'il appréhendait qu'elle ne vît Alamir : Je suis très fâchée, dit-elle à son écuyer, de ne pouvoir accorder au prince de Tharse ce qu'il souhaite de moi. Si je croyais que ma présence pût contribuer à sa guérison, je le verrais avec joie, mais, comme je suis persuadée qu'elle lui serait inutile, je le supplie de trouver bon que je ne le voie pas, et je vous conjure de l'assurer que j'ai beaucoup de déplaisir de l'état où il est. L'écuyer se retira après cette réponse. Félime demeura abîmée dans une douleur dont elle ne donnait néanmoins d'autres marques que son silence : Zayde avait de la tristesse de celle de Félime, et elle avait aussi quelque pitié de la misérable destinée du prince de Tharse : Consalve était combattu entre la joie d'avoir vu la complaisance de Zayde pour des sentiments qu'il