Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 1.djvu/40

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et de Marie de Péna, d'une ancienne famille de Provence. Le talent et les honneurs littéraires étaient depuis long-temps un héritage de celle famille. Au treizième siècle, Hugues de Péna, secrétaire du roi de Naples, Charle Ier, et auteur de tragédies, avait reçu le laurier du poëte, des mains de la reine Béatrix.

Mademoiselle de la Vergne eut le bonheur d'avoir un père en qui le mérite égalait la tendresse. Il prit soin lui-même de l'éducation de sa fille, et cette éducation fut tout à-la-fois solide et brillante : les lettres et les arts concoururent à embellir un heureux naturel. Ménage et le père Rapin se chargèrent d'enseigner le latin à mademoiselle de la Vergne. S'il en faut croire Ségrais, elle n'avait encore que trois mois de leurs leçons, lorsqu'elle leur donna le véritable sens d'un passage qu'ils expliquaient différemment, et que ni l'un ni l'autre n'entendait bien. Ménage chanta son écolière dans la langue qu'il lui avait apprise. Mademoiselle de la Vergne était appelée, dans ses madrigaux latins, du nom de Laverna, qui est aussi celui de la déesse des voleurs. Cette bizarre rencontre, qu'un homme d'un esprit un peu plus fin eût peut-être évitée, fit faire, contre le pauvre Ménage, cette épigramme latine, qui est d'un assez bon tour :


Lesbia nulla tibi est, nulla tibi dicta Corinna,
Carmin laudatur Cinthia nulla tuo ;
Sed cùm doctorum compiles scrinia vatum
Nil mirum si sit culta Laverna tibi.


J'en vais dire le sens pour celles de nos dames qui n'entendent pas le latin aussi-bien que madame de la Fayette :