Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/130

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redemander. M. de Clèves a eu l’imprudence de lui dire qu’il l’avait, et il a eu la faiblesse de céder aux prières que M. de Nemours lui a faites de la lui rendre. Vous me mettez dans le plus grand embarras où je puisse jamais être, repartit madame la dauphine, et vous avez tort d’avoir rendu cette lettre à M. de Nemours : puisque c’était moi qui vous l’avais donnée, vous ne deviez point la rendre sans ma permission. Que voulez-vous que je dise à la reine, et que pourra-t-elle s’imaginer ? Elle croira, et avec apparence, que cette lettre me regarde, et qu’il y a quelque chose entre le vidame et moi. Jamais on ne lui persuadera que cette lettre soit à M. de Nemours. Je suis très-affligée, répondit madame de Clèves, de l’embarras que je vous cause ; je le crois aussi grand qu’il est ; mais c’est la faute de M. de Clèves, et non pas la mienne. C’est la vôtre, répliqua madame la dauphine, de lui avoir donné la lettre ; et il n’y a que vous de femme au monde qui fasse confidence à son mari de toutes les choses qu’elle sait. Je crois que j’ai tort, madame, répliqua madame de Clèves ; mais songez à réparer ma faute, et non pas à l’examiner. Ne vous souvenez-vous point, à-peu-près de ce qui est dans cette lettre, dit alors la reine dauphine ? Oui, madame, répondit-elle, je m’en souviens, et l’ai relue plus d’une fois. Si cela est, reprit madame la dauphine, il faut que vous alliez tout-à-l’heure la faire écrire d’une main inconnue ; je l’enverrai à la reine : elle ne la montrera pas à ceux qui l’ont vue ; quand elle le ferait, je soutiendrai toujours que c’est celle que Chastelart m’a donnée, et il n’oserait dire le contraire.

Madame de Clèves entra dans cet expédient ; et d’au-