Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 2.djvu/52

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Elle ne se trouva pas la même disposition à dire à sa mère ce qu’elle pensait des sentiments de ce prince, qu’elle avait eue à lui parler de ses autres amants : sans avoir un dessein formé de le lui cacher, elle ne lui en parla point. Mais madame de Chartres ne le voyait que trop, aussi-bien que le penchant que sa fille avait pour lui. Cette connaissance lui donna une douleur sensible : elle jugeait bien le péril où était cette jeune personne, d’être aimée d’un homme fait comme M. de Nemours, pour qui elle avait de l’inclination. Elle fut entièrement confirmée dans les soupçons qu’elle avait de cette inclination, par une chose qui arriva peu de jours après.

Le maréchal de Saint-André, qui cherchait toutes les occasions de faire voir sa magnificence, supplia le roi, sur le prétexte de lui montrer sa maison, qui ne venait que d’être achevée, de lui vouloir faire l’honneur d’y aller souper avec les reines. Ce maréchal était bien aise aussi de faire paraître aux yeux de madame de Clèves cette dépense éclatante qui allait jusqu’à la profusion.

Quelques jours avant celui qui avait été choisi pour ce souper, le roi dauphin, dont la santé était assez mauvaise, s’était trouvé mal, et n’avait vu personne. La reine sa femme avait passé tout le jour auprès de lui. Sur le soir, comme il se portait mieux, il fit entrer toutes les personnes de qualité qui étaient dans son antichambre. La reine dauphine s’en alla chez elle : elle y trouva madame de Clèves et quelques autres dames qui étaient le plus dans sa familiarité.

Comme il était déjà assez tard, et qu’elle n’était