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A D O N I S .

Et vous, Antres cachez, favorables retraites,
Où nos cœurs ont goûté des douceurs si secretes ;
Grottes, qui tant de fois avez vû mon Amant
Me raconter des yeux son fidelle tourment ;
Lieux amis du repos, demeures solitaires,
Qui d’un thresor si rare estiez depositaires,
Deserts, rendez-le-moy[1] : deviez-vous avec luy
Nourrir chez vous le Monstre auteur de mon ennuy ?
Vous ne répondez point. Adieu donc, ô belle ame !
Emporte chez les morts ce baiser tout de flâme :
Je ne te verray plus ; adieu, cher Adonis !
Ainsi Venus cessa. Les rochers, à ses cris
Quittant leur dureté, répandirent des larmes :
Zephyre en soûpira ; le jour voila ses charmes.
D’un pas précipité sous les eaux il s’enfuit,
Et laissa dans ces lieux une profonde nuit.
 

  1. Manuscrit de 1658 :
    Representez-le-moy…