Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 1.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme des hommes ceux qui n’ont pas la même croyance que nous ; sentiment atroce qui conduit toujours à l’inhumanité, et produit tous les forfaits, parce qu’on se croit dispensé de tous les devoirs.

Le schah de Lamo, instruit par ces terribles exemples, se soumit volontairement à un tribut annuel de six cents méticaux d’or. Acugna remit à la voile, et, remontant au delà du cap de Guardafui, il rejoignit Alvaro Tellès, qui avait été écarté de la flotte avec six vaisseaux, et s’était enrichi par la prise de cinq bâtimens maures. Ils attaquèrent ensemble et prirent l’île de Socotora sur la côte d’Éthiopie, à 12° de latitude nord, vis-à-vis le cap de Guardafui. C’était là le terme de leur commission. L’île était habitée par des chrétiens qu’on nomme jacobites, qui suivaient le rit grec, ainsi que les chrétiens d’Abyssinie, et reconnaissaient le patriarche d’Alexandrie. Il y avait un fort et une garnison de quatre-vingts Maures mahométans. Il ne s’en sauva qu’un qui était aveugle, et qu’on trouva dans un puits. On lui demanda comment il avait pu y descendre. Il répondit : Les aveugles ne voient que le chemin de la liberté. Cette réponse lui valut la vie. Les Portugais étaient quelquefois capables de clémence. À la prise d’Hoïa, un jeune Maure poursuivi dans les bois avec sa maîtresse, qui n’avait pas voulu se séparer de lui, se retourna vers ceux qui le pressaient, et, l’embrassant d’une main, il se préparait à combattre de