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et qu’après avoir connu si parfaitement la sienne, ils le traiteraient moins en prisonnier qu’en héros. À l’égard du serment qu’il avait fait de ne point souffrir, tant qu’il lui resterait une goutte de sang, que son vaisseau pût être employé au service des ennemis de l’Angleterre, ils lui firent considérer que, dans l’état où ce bâtiment était réduit, il ne fallait plus craindre qu’il servît à personne. Greenwill parut sourd à toutes ces raisons. Il demandait à ceux qui voulaient ménager sa vie s’il ne valait pas mieux la perdre glorieusement que de la passer à la rame ou dans les horreurs d’un cachot. Mais pendant ce débat le pilote se fit conduire vers Alphonse Bacan, amiral de la flotte espagnole. Il lui déclara que, dans le désespoir où les Anglais étaient réduits, il ne fallait pas s’attendre à leur faire abandonner les armes sans une composition honorable ; et protestant qu’ils n’attendaient que son retour pour se faire sauter avec leur vaisseau, il demanda deux articles qui lui furent accordés, l’un, qu’ils seraient exempts de toutes sortes de violences, et même d’emprisonnement ; l’autre, que l’on conviendrait d’une rançon raisonnable, pour laquelle on se contenterait de la parole de Greenwill et des autres officiers anglais. Au surplus, les traitemens que ce brave capitaine redoutait de la part des Espagnols prouvent quelle opinion l’on avait de cette nation, et des cruautés qu’elle exerçait contre des ennemis qui, s’appelant hérétiques,