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couvert, et les marques de terre auxquelles il pouvait être reconnu.

Dès qu’il fut libre, il offrit ses services à Jean Gonsalès Zarco, gentilhomme portugais, chargé par le prince Henri de faire des découvertes dans la mer d’Afrique, et qui, deux ans auparavant, avait mouillé à Porto-Santo, dans le voisinage de Madère, et y avait laissé quelques Portugais. Ce fut là qu’il dirigea sa route avec Moralès. Les Portugais de Porto-Santo lui racontèrent, comme une vérité constante, qu’au sud-ouest de l’île on voyait sans cesse des ténèbres impénétrables qui s’élevaient de la mer jusqu’au ciel ; que jamais on ne s’apercevait qu’elles diminuassent, et qu’elles paraissaient gardées par un bruit effrayant qui venait de quelque cause inconnue. Comme on n’osait encore s’éloigner de la terre, faute d’astrolabe et d’autres instrumens dont l’invention est postérieure, et qu’on s’imaginait qu’après avoir perdu la vue des côtes, il était impossible d’y retourner sans un secours miraculeux de la Providence, cette prétendue obscurité passait pour un abîme sans fond, ou pour une bouche de l’enfer.

Les exhortations de Moralès firent mépriser à Zarco ces fausses terreurs. Ils jugèrent tous deux que ces ténèbres dont on voulait leur faire un sujet d’épouvante étaient au contraire la marque certaine de la terre qu’ils cherchaient. Cependant, après quelque délibération, ils convinrent de s’arrêter à Porto-Santo jusqu’au