Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 14.djvu/43

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et que tous ceux qui mépriseraient cet avis périraient dans l’intervalle. Guatimozin hasardait cette imposture dans la confiance qu’il avait à ses derniers avantages ; et, se persuadant en effet que la faveur de ses dieux avait commencé à se déclarer pour lui, il eut l’adresse d’introduire dans le camp des alliés de Cortez plusieurs émissaires qui répandirent les mêmes menaces. Les oracles du dieu des armes avaient une réputation si bien établie dans toutes ces contrées, que les Américains des différentes nations étaient accoutumés à les respecter. Un terme si court frappa leur imagination jusqu’à les déterminer aussitôt à quitter les Espagnols ; et dans l’espace de deux ou trois nuits, tous leurs quartiers se trouvèrent abandonnés. Les Tlascalans mêmes délogèrent dans un grand désordre, à l’exception de quelques nobles, sur lesquels la crainte n’agissait pas moins, mais qui semblaient préférer l’honneur à la vie. Cortez, alarmé d’un incident qui entraînait la ruine de son entreprise, jugea le remède d’autant plus difficile qu’il ne connaissait point encore la nature du mal ; mais, après s’être heureusement éclairci, il se hâta de faire suivre les déserteurs, pour les engager à suspendre du moins leur marche jusqu’à la fin des huit jours, en leur faisant considérer que ce délai ne changerait rien à leur sort, et les assurant d’ailleurs qu’ils regretteraient de s’être laissé tromper par de fausses prédictions. Ils consentirent à passer le reste de la semaine dans des