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j’ai ordre de leur déclarer la guerre. Ce collier affermit ma parole.

» Voilà ce que j’avais à dire à Grangula, à qui je m’adresse pour rapporter aux cinq nations la déclaration que le roi mon maître m’a donné ordre de leur faire. Il ne voudrait pas qu’ils l’obligeassent d’envoyer une puissante armée pour entreprendre une guerre qui leur serait fatale. Il serait fâché aussi que ce fort de Catarocoui, qui est un ouvrage de paix, servît de prison à vos guerriers. Empêchons de part et d’autre que ce malheur n’arrive. Les Français, qui sont frères et amis des cinq nations, ne troubleront jamais leur repos, pourvu qu’elles donnent la satisfaction que je leur demande, et que les traités soient désormais observés. Je serais au désespoir que mes paroles ne produisissent pas l’effet que j’en attends ; car je serais alors obligé de me joindre au gouverneur de New-Yorck, qui, par l’ordre du roi son maître, m’aiderait à brûler les cinq villages et à vous détruire. Ce collier affermit ma parole. »

L’interprète ayant cessé de parler, Grangula, qui, pendant ce discours, ne regardait que le bout de sa pipe, se leva, fit cinq ou six tours dans le cercle, composé de sauvages et de Français, revint à sa place, se plaça debout devant le général, et, le regardant d’un œil fixe, lui répondit dans ces termes :

« Onnontio[1], je t’honore. Tous les guer-

  1. C’est un titre d’honneur que les sauvages donnaient aux gouverneurs français. Il signifie grande montagne.