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le nombre de leurs esclaves. Pour en fournir aux Européens, leur méthode est d’envoyer une troupe de gardes autour de quelque village, avec ordre d’enlever le nombre des habitans dont ils ont besoin. On lie les mains derrière le dos à ces misérables victimes pour les conduire droit aux vaisseaux ; et lorsqu’ils y ont reçu la marque du bâtiment, ils disparaissent pour jamais. On transporte ordinairement les enfans dans des sacs, et l’on met un bâillon aux hommes et aux femmes, de peur qu’en traversant les villages, ils n’y répandent l’alarme par leurs cris. Ce n’est pas dans les lieux voisins des comptoirs qu’on exerce ces violences ; l’intérêt des princes n’est pas de les ruiner ; mais les villes intérieures du pays sont traitées sans ménagement. Il arrive quelquefois que les prisonniers s’échappent des mains de leurs gardes, et que, rassemblant les habitans par leurs cris, ils poursuivent ensemble les ministres du roi. S’ils peuvent les arrêter, leur vengeance est de les conduire à la ville royale. Le roi ne manque jamais de désavouer leur commission ; mais, pour ne rien perdre de ses espérances, et sous prétexte de justice, il vend sur-le-champ les coupables pour l’esclavage ; et si les habitans arrêtés paraissent devant le roi pour rendre témoignage contre leurs ravisseurs, ils sont aussi vendus, comme si le malheur qu’ils ont souffert devenait un droit sur leur liberté.

On rapporte un usage singulier du royaume