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tendons et de nerfs d’une force singulière. Il a, de chaque côté, quatorze dents, quatre incisives, quatre de l’œil, et six molaires. Sa langue est fort grosse, rude et couverte de plusieurs pointes aussi dures que de la corne, longues de trois ou quatre lignes et tournées vers le gosier. Cette étrange superficie de sa langue rend ses lèchemens si dangereux, qu’ils écorchent aussitôt la peau ; et pour peu qu’il sente le sang, il ne pense plus qu’à dévorer. Le domestique d’un Français ayant souffert qu’un lion privé, qui couchait dans la chambre de son maître, prît l’habitude de le caresser et de le lécher, fut averti souvent du danger où il s’exposait. Mais, se fiant à la douceur et à la familiarité de cet animal, il négligea les avertissemens. Son maître, réveillé par quelque bruit, jeta les yeux dans sa chambre, et ne fut pas peu effrayé de voir la tête de son valet entre les griffes du lion qui avait déjà dévoré le corps. Il se leva aussitôt, et, gagnant son cabinet, il appela au secours quelques autres Français, qui tuèrent le monstre à coups de fusil.

Quoique le cou du lion soit d’une bonne longueur, il est d’une raideur étonnante. Aristote s’est trompé lorsqu’il l’a cru composé à un seul os ; il consiste en plusieurs vertèbres mobiles, qui ne laissent pas d’être parfaitement jointes. Celui du mâle est couvert d’une longue et rude crinière, qui se dresse lorsqu’il est en furie. La femelle est sans crinière,