Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 22.djvu/206

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nuisible à leur vie. La Providence leur fournissait abondamment des tortues, parce qu’elles venaient pondre alors sur le rivage ; et, profitant de la saison, ils en tuèrent un si grand nombre, qu’ils eurent de quoi vivre pendant six mois. Lorsque cette provision fut épuisée, ils virent arriver dans l’île une espèce de grands oiseaux de mer, nommés par les Portugais paxaros bobos, ou boubies, qui venaient y faire leurs nids. Les débris du caisson leur servirent encore à tuer une assez grande quantité de ces animaux pour s’en nourrir pendant six autres mois. Ainsi les tortues et les boubies leur firent des provisions régulières pour les deux parties de l’année, sans autre préparation, à la vérité, que d’en laisser sécher la chair au soleil. Ils étaient au nombre de dix-huit. Leurs habits s’étant usés avec le temps, ils s’avisèrent d’écorcher les oiseaux, et d’en coudre les peaux ensemble avec quelques aiguilles qu’ils avaient apportées. Quelques petits palmiers dispersés dans leur solitude leur fournirent une sorte de fil. En hiver, pour se défendre du froid, ils se retiraient dans les grottes qu’ils avaient creusées avec leurs mains. Sept ans s’écoulèrent sans aucun changement dans leur situation. Ils voyaient passer quelquefois des navires ; mais la crainte des bancs et des sèches arrêtant toujours les pilotes, leurs cris et leurs signes ne purent exciter personne à les secourir : ils jugèrent même par quantité de planches et d’autres débris que les flots leur amenèrent dans