Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 22.djvu/269

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variété. « Depuis la tempête qui nous accueillit au débouquement, nous eûmes, dit Anson, une suite continuelle de temps orageux, qui fit avouer à nos marins les plus expérimentés que tout ce qu’ils avaient appelé tempête n’était rien en comparaison. Elles élevaient des vagues si hautes et si courtes, qu’on ne voit rien de semblable dans aucune mer connue. Ce n’était pas sans raison que nous frémissions continuellement. Une seule vague qui se serait brisée sur notre vaisseau nous aurait coulés à fond. Elles causaient d’ailleurs un roulis si violent, qu’on était dans un danger continuel d’être brisé contre le tillac ou contre les côtés du vaisseau. Nous eûmes quelques gens de tués par ces accidens, et d’autres fort blessés. Un de nos meilleurs matelots fut jeté hors du bord et se noya ; un autre se disloqua le cou. Un troisième fut jeté dans l’écoutille, et se cassa la cuisse. Un de nos contre-maîtres se cassa la clavicule en deux endroits. Ce qui contribue à rendre ces tempêtes plus dangereuses, c’est leur inégalité et les intervalles trompeurs qui les séparent. Elles étaient accompagnées de pluie froide et de neige qui couvraient nos manœuvres de glace et gelaient nos voiles, ce qui rendait les unes et les autres si cassantes, qu’elles ne pouvaient résister au moindre effort. Nos gens en avaient les membres engourdis. À quelques-uns, les pieds et les mains gelèrent et furent attaqués par la gangrène, etc. »