Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 22.djvu/345

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bre. Le hasard de quelque vaisseau qui relâcherait dans l’île était sans aucune vraisemblance. Peut-être le Centurion était-il le premier bâtiment européen qui en eût approché. Il ne fallait pas attendre de plusieurs siècles les accidens qui l’y avaient conduit. Il ne leur restait donc que la triste attente de passer le reste de leurs jours dans cette île ; encore n’était-ce pas leur plus grande crainte. Ils devaient appréhender que le gouverneur de Guam, instruit de leur malheur, n’envoyât contre eux toutes ses forces ; et le plus favorable traitement qu’ils pussent envisager était de passer toute leur vie dans les chaînes. Peut-être même avaient-ils à redouter un traitement infâme, en qualité de pirates ; car leur commission était à bord du vaisseau.

» Quoique ces cruelles idées fissent leur impression sur le chef d’escadre, il prit un air ferme et tranquille. Ses premières réflexions étaient tombées sur les moyens de se délivrer d’une situation si désespérée. Il communiqua aux plus intelligens de la troupe un plan qu’il jugea possible ; et, le voyant confirmé de leur approbation, il assembla tous les autres pour leur représenter qu’il y avait peu d’apparence que le Centurion fut submergé ; que, s’ils considéraient avec attention la force d’un tel vaisseau, ils conviendraient qu’il était capable de soutenir les plus fortes tempêtes ; que peut-être reparaîtrait-il dans peu de jours ; mais que, dans la supposition la moins favorable, on devait juger