Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 3.djvu/202

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

forme une sorte d’arcade assez haute et d’un assez grand diamètre pour couvrir entièrement une pirogue, la remplir d’eau et l’abîmer avant qu’elle puisse toucher au rivage. Les deux premières vagues ne s’enflent pas tant, et ne forment point d’arche en approchant du rivage : la première, parce qu’elle n’est pas repoussée par une vague précédente qui ait eu le temps de se briser avant qu’elle arrive ; la seconde, parce que le retour seul de la première n’a pas assez de force pour repousser fort impétueusement celle qui la suit. Mais la troisième, qui trouve le repoussement de la seconde augmenté par celui de la première, forme cette arcade terrible, qui porte proprement le nom de barre, et qui a causé la perte de tant de malheureux.

L’adresse des rameurs nègres consiste à sauter promptement dans l’eau, et à soutenir la pirogue des deux côtés pour empêcher qu’elle ne tourne. Cette opération la conduit à terre dans un moment, avec autant de sûreté pour les passagers que pour les marchandises. Depuis que les Européens font le commerce à Juida, les Nègres du pays ont eu le temps de se familiariser avec ce dangereux passage. Il est rare à présent qu’une pirogue y périsse. Il arrive encore plus rarement que les rameur aient quelque risque à courir, parce qu’ils sont excellens nageurs, et qu’étant nus ils comptent pour rien d’être un peu secoués par les flots. Leur hardiesse est si tranquille, qu’ils