Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 3.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ignorait les usages du pays, lui répondit avec un sourire : « Soyez là-dessus sans inquiétude ; vous ne me trouverez pas mort, car je vivrai toujours. » Bosman s’aperçut fort bien qu’il avait commis une imprudence. Lorsqu’il fut retourné au comptoir, son interprète lui apprit qu’il était défendu, sous peine de la vie, de parler de mort en présence du roi, et, bien plus, de parler de la sienne. Cependant étant devenu plus familier avec ce prince, dans son second et dans son troisième voyage, il prit la liberté de railler souvent les seigneurs de la cour sur la crainte qu’ils avaient de la mort ; il parvint à les faire rire de leur propre faiblesse, et le roi même prenait plaisir à l’entendre ; mais les Nègres n’en étaient pas moins réservés, et n’osaient ouvrir la bouche sur le même sujet.

Ils sont persuadés qu’il existe un être dont l’univers est l’ouvrage, et qui mérite par conséquent d’être préféré aux fétiches, qui sont eux-mêmes ses créatures ; mais ils ne le prient point, et ne lui offrent point de sacrifices. « Ce grand Dieu, disent-ils, est trop élevé au-dessus d’eux pour s’occuper de leur situation ; il a confié le gouvernement du monde aux fétiches, qui sont des puissances subordonnées auxquelles les Nègres doivent s’adresser. »

Les Nègres les plus sensés de Juida, du moins entre les grands, ont une idée confuse de l’existence d’un seul Dieu, qu’ils placent dans