Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 3.djvu/221

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de son culte. L’armée de Juida étant près de livrer bataille à celle d’Ardra, il sortit de celle-ci un gros serpent qui se retira dans l’autre : non-seulement sa forme n’avait rien d’effrayant, mais il parut si doux et si privé, que tout le monde fut porté à le caresser. Le grand sacrificateur le prit dans ses bras et le leva pour le faire voir à toute l’armée. La vue de ce prodige fit tomber tous les Nègres à genoux : ils adorèrent leur nouvelle divinité, et, fondant sur leurs ennemis avec un redoublement de courage, ils remportèrent une victoire complète. Toute la nation ne manqua point d’attribuer un succès si mémorable à la vertu du serpent. Il fut rapporté avec toutes sortes d’honneurs ; on lui bâtit un temple, on assigna un fonds pour sa subsistance, et bientôt ce nouveau fétiche prit l’ascendant sur toutes les anciennes divinités ; son culte ne fit ensuite qu’augmenter à proportion des faveurs dont on se crut redevable à sa protection. Les trois anciens fétiches avaient leur département séparé : on s’adressait à la mer pour obtenir une heureuse pêche, aux arbres pour la santé, et à l’Agoye pour les conseils ; mais le serpent préside au commerce, à la guerre, à l’agriculture, aux maladies, à la stérilité, etc. Le premier édifice qu’on avait bâti pour le recevoir parut bientôt trop petit. On prit le parti de lui élever un nouveau temple avec de grandes cours et des appartemens spacieux. On établit un grand pontife et des prêtres pour le servir. Tous les ans on choisit