Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 3.djvu/232

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sont chargées de ce soin. Elles prennent le temps où le maïs commence à verdir, et, sortant de leurs maisons, qui sont à peu de distance de la ville, armées de grosses massues, elles entrent dans les rues, en plusieurs bandes de trente ou quarante. Elles y courent comme des furieuses, depuis huit heures du soir jusqu’à minuit, en criant nigo bodiname ! c’est-à-dire, dans leur langue, arrêtez, prenez ! Toutes les jeunes filles de l’âge de huit ans jusqu’à douze qu’elles peuvent arrêter dans cet intervalle leur appartiennent de droit ; et, pourvu qu’elles n’entrent point dans les cours ou dans les maisons, il n’est permis à personne de leur résister ; elles seraient soutenues par les prêtres, qui achèveraient de tuer impitoyablement ceux qu’elles n’auraient pas déjà tués de leurs massues.

Les jeunes filles sont traitées d’abord avec beaucoup de douceur dans leur cloître. On leur fait apprendre les danses et les chants sacrés qui servent au culte du serpent ; mais la dernière partie de ce noviciat est très-sanglante. Elle consiste à leur imprimer dans toutes les parties du corps, avec des pointes de fer, des figures de fleurs, d’animaux, et surtout de serpens. Comme cette opération ne se fait pas sans de vives douleurs et sans une grande effusion de sang, elle est suivie fort souvent de fièvres dangereuses. Les cris touchent peu ces impitoyables vieilles ; et personne n’osant approcher de leurs maisons, elles sont sûres de