Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 3.djvu/242

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Malgré tous les respects que le peuple rend aux femmes du roi, ce prince les traite lui-même avec peu de considération ; il les emploie comme autant d’esclaves à toutes sortes de services ; il les vend aux marchands de l’Europe, sans autre règle que son caprice ; et si l’on en croit Desmarchais, le palais royal est moins un sérail qu’une de ces loges que les Français du pays appellent captiveries. Il assure que, si le roi n’a point d’esclaves dans ses prisons, il ne balance point à prendre une partie de ses femmes, auxquelles il fait appliquer aussitôt la marque de la compagnie qui les arrête, et il les voit partir sans regret pour l’Amérique. Philips confirme ce témoignage. En 1693, dit-il, faute d’esclaves ordinaires pour en fournir aux vaisseaux, le roi vendit trois ou quatre cents de ses propres femmes, et parut fort satisfait d’avoir rendu la cargaison complète. On ne saurait douter de la vérité de ce récit ; cependant les Hollandais n’ont jamais obtenu de ces cargaisons de reines ; et Bosman, qui était sur la côte vers le même temps, raconte seulement qu’à la moindre occasion de dégoût, le roi vend quelquefois dix-huit ou vingt de ses femmes. Il ajoute que ce retranchement n’en diminue pas le nombre, parce que trois de ses principaux capitaines ont pour unique office de remplir continuellement les vides. Lorsqu’ils découvrent une jeune et belle fille, leur devoir est de la présenter au roi : chaque famille se croit