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Leur misère fut respectée ; mais ils eurent beaucoup à souffrir du côté de la nourriture. On leur donnait par mois trente livres de biscuit et vingt-quatre pintes d’eau ; et comme ils n’avaient pas de lieu fermé pour y garder cette provision, il arrivait souvent qu’on leur en dérobait quelques parties, surtout pendant la nuit ; ils n’avaient pas même de quoi se mettre à couvert de la pluie. Une autre incommodité, qui n’était pas moins nuisible à leur repos qu’à leurs alimens, était la multitude d’une sorte d’insectes ailés, fort semblables aux hannetons, qui sont un tourment continuel dans le retour des Indes, et qu’on apporte de cette contrée. Ils jettent une puanteur insupportable lorsqu’on les écrase : ils mangent le biscuit, ils percent les coffres et les tonneaux ; ce qui cause souvent la perte du vin et des autres liqueurs. La caraque était remplie de ces fâcheux animaux. Pyrard trouvait d’ailleurs le biscuit portugais de très-bon goût. Il est aussi blanc, dit-il, que notre pain de chapitre ; aussi n’y emploie-t-on que le pain le plus blanc, qu’on coupe en quatre morceaux plats, et qu’on remet deux fois au feu pour le faire cuire. Tout le monde avait la même portion d’eau que les officiers du navire. L’épargne est recommandée sur cet article, parce que, les provisions générales ne devant durer que trois mois, on se trouve réduit à de terribles extrémités lorsque le voyage est beaucoup plus long. Quelques honnêtes gens invitaient quelquefois les trois