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lequel ils versent ce qui a été distillé depuis le soir ou le matin du jour précédent. Cette liqueur porte, au Malabar comme dans l’Indoustan, le nom de tary ou soury. C’est la seule qu’on recueille régulièrement sur toute la côte. En la distillant, on en fait d’assez bonne eau-de-vie, qui devient très-violente en la passant trois fois à l’alambic. Si le tary frais est jeté dans une poêle pour y bouillir avec un peu de chaux vive, il s’épaissit en consistance de miel. S’il bout un peu plus long-temps, il acquiert la solidité du sucre, et même à peu près sa blancheur ; mais il n’a jamais la délicatesse de celui des cannes. C’est de ce sucre que le peuple fait toutes ses confitures : les Portugais l’appellent jagre-jagara, qui est le nom malabare.

Les cocotiers dont on fait distiller le tary par l’incision des bourgeons ne portent aucun fruit, parce que c’est de cette liqueur que le fruit se forme et se nourrit. Mais ceux qu’on épargne pour en tirer des cocos poussent de chacun de leurs bourgeons une sorte de grappe composée de dix, douze ou quinze cocos au plus. La superficie de leur première écorce est d’abord verte et fort tendre. Elle contient une liqueur claire, agréable, saine et rafraîchissante, qui monte quelquefois à plus d’une chopine dans les plus gros fruits. L’écorce qui la renferme immédiatement se mange avec plaisir lorsqu’elle est tendre, et a le goût des fonds d’artichauts. Mais à mesure que les cocos mû-