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s’y vendent pas avec plus de décence qu’en Turquie, c’est-à-dire qu’on les y mène en troupes de l’un ou de l’autre sexe comme les animaux les plus vils, et que chacun a la liberté de les visiter curieusement. Les plus chers, du temps de Pyrard, ne coûtaient que vingt ou trente pardos, quoiqu’il s’y trouvât des hommes très-bien faits, et de fort belles femmes de tous les pays des Indes, dont la plupart savaient jouer des instrumens, broder, coudre, faire toutes sortes d’ouvrages, de confitures et de conserves. Pyrard observa que, malgré la chaleur du pays, tous ces esclaves indiens des deux sexes n’exhalent pas de mauvaise odeur ; au lieu que les Nègres d’Afrique sentent, dit-il, le porreau vert, odeur qui devient insupportable lorsqu’ils sont échauffés.

Les Portugais de Goa ne se font pas un scrupule d’user des jeunes esclaves qu’ils achètent, lorsqu’elles sont sans maris. S’ils les marient eux-mêmes, ils renoncent à ce droit, et leur parole devient une loi qu’ils ne croient pas pouvoir violer sans crime. S’ils ont un enfant mâle d’une esclave, l’enfant est légitimé, et la mère est déclarée libre. C’est une richesse à Goa qu’un grand nombre d’esclaves : outre ceux dont on tire des services domestiques, d’autres qui s’occupent au-dehors sont obligés d’apporter chaque jour ou chaque semaine à leur maître ce qu’ils ont gagné par leur travail. On voit dans le même marché un grand nombre de ces esclaves qui ne sont point à vendre,