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haute montagne nommée Botinafau, d’où coulaient plusieurs ruisseaux d’eau douce. Pendant six jours que nous employâmes à la côtoyer, nous eûmes le spectacle d’un grand nombre de bêtes farouches, qui ne paraissaient pas effrayées de nos cris. Cette montagne n’a pas moins de quarante ou cinquante lieues de longueur ; elle est suivie d’une autre qui se nomme Gangitanou, et qui ne nous parut pas moins sauvage. Tout ce pays est couvert de forêts si épaisses, que le soleil n’y peut communiquer ses rayons ni sa chaleur. Similau nous assura néanmoins qu’il était habité par des peuples difformes, nommés Gigohos, qui ne se nourrissaient que de leur chasse et du riz que les marchands chinois leur apportaient en échange pour leurs fourrures. Il ajouta qu’on tirait d’eux chaque année plus de deux mille peaux, pour lesquelles on payait des droits considérables aux douanes de Pocasser et de Lantau, sans compter celles que les Gigohos emploient eux-mêmes à se couvrir et à tapisser leurs maisons. Faria, qui ne perdait pas une seule occasion de vérifier les récits de Similau pour se confirmer dans l’opinion qu’il avait de sa bonne foi, le pressa de lui faire voir un de ces difformes habitans dont il exagérait la laideur. Cette proposition parut l’embarrasser. Cependant, après avoir répondu à ceux qui traitaient ses discours de fables que son inquiétude ne venait que du naturel farouche des barbares, il promit à Faria de