Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 7.djvu/193

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du premier mandarin, s’il meurt avant lui, de prendre après ma mort les mêmes soins de cette auguste lettre. Si, par le dernier des malheurs, aucun de nous ne pouvait arriver au cap de Bonne-Espérance, celui qui en sera chargé le dernier ne manquera point de l’enterrer, avant de mourir, sur une montagne ou dans le lieu le plus élevé qu’il pourra trouver, afin qu’ayant mis ce précieux dépôt à couvert d’insulte, il meure prosterné dans le même lieu, avec autant de respect en mourant que nous en devons au roi pendant notre vie. Voilà ce que j’avais à vous recommander. Après cette explication, reprenons courage, ne nous séparons jamais, allons à petites journées ; la fortune du grand roi notre maître nous protégera toujours. »

» Ce discours nous remplit de résolution ; cependant, au lieu de nous attacher à suivre les côtes, on convint qu’il fallait tenter de rejoindre les Portugais, et prendre le chemin qu’on pouvait juger qu’ils avaient suivi. Nous avions devant nous une grande montagne, et sur la droite, un peu à côté, quelques petites collines. Nous nous persuadâmes aisément que, fatigués comme ils étaient, ils n’auraient pas choisi les plus rudes passages, quoiqu’ils fussent les plus droits. On prit par la première colline : cette journée me coûta d’étranges douleurs ; non-seulement la nuit précédente m’avait rendu les jambes raides, mais elles commencèrent à s’enfler avec tout mon corps.