Page:La Landelle - Le Dernier des flibustiers, Haton, 1884.djvu/55

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Il n’en fit rien. Avant et par-dessus tout, le conseil devait entendre son récit complet.

— Le Saint-Pierre et Saint-Paul mit sous voiles le 11 mai 1771, poursuivit Béniowski. J’y avais arboré le drapeau de la Pologne ; pouvais-je en prendre un autre ?… C’est ici que commencent les actes de mon commandement maritime, sur lesquels vous aurez à statuer. Suis-je un pirate pour avoir enlevé de vive force un bâtiment d’une nation ennemie de la mienne ? Suis-je un pirate pour avoir livré combat à des navires de cette nation ? – Mais avant ce combat, aux îles Aléoutes, j’opère jonction avec l’équipage d’un brig français naufragé, la Douairière, armée pour ma délivrance par mon ami le vicomte Richard de Chaumont-Meillant. N’y aurait-il dans la division navale française personne qui ait eu connaissance de l’armement de ce brig, le témoignage unanime des quarante marins de la Douairière qui ont survécu à nos désastres, serait une preuve suffisante pour convaincre M. le baron de Luxeuil lui-même.

— Je demande la parole ! s’écria le baron.

— Je vous l’accorde, M. le rapporteur, dit le président.

— Je ferai observer au conseil, s’empressa de dire le capitaine de frégate, que les faits de piraterie les mieux prouvés sont postérieurs à la jonction des divers équipages réunis sous les ordres de Béniowski, et j’ajouterai que tout navire dépourvu d’expéditions régulières est un navire pirate.

— En droit, oui, M. le rapporteur ; mais jusqu’ici nous voyons qu’en fait le Saint-Pierre et Saint-Paul était par force majeure dénué d’expéditions.

— Parmi les pièces à charge, poursuivit Béniowski, figure la traduction d’une lettre signée Estève Finvallen. Je démens tous les faits énoncés dans cette lettre, elle est signée d’un faux nom, elle me fait suivre un itinéraire différent du mien ; enfin,