Page:La Madelène - Le comte Gaston de Raousset-Boulbon, sa vie et ses aventures, 1859.djvu/102

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

se créer un point d’appui sérieux dans le pays même. Les habitants de la frontière, incessamment pillés par les Apaches, réduits à l’indigence et au désespoir, se montraient exaspérés contre un commandant général qui consacrait à des entreprises de mines, au service d’intérêts particuliers, les troupes et l’argent destinés à protéger la Sonore contre les Indiens. L’émigration seule pouvait opposer une barrière efficace à ces terribles voisins. Le séjour des Français au Saric l’avait prouvé ; à trois reprises différentes ils avaient repoussé les Apaches, et victime de son courage, un brave sergent, frappé dans une de ces courses, reposait auprès de la vieille abbaye.

Les esprits étaient partout dans une grande fermentation ; ces populations, engourdies par un long servage, semblaient vouloir enfin secouer leur torpeur et briser leurs chaînes. M. de Raousset parcourut les rives du San Ignacio et de l’Altar, il excita les ressentiments, il échauffa les sympathies ; il ne laissa pas un seul pueblo où des hommes influents ne fussent prêts à soutenir sa cause ; il se créa des partisans jusque dans le clergé ; bientôt il eut en main les preuves qu’un parti se lèverait pour lui le lendemain de la victoire. Quant à la victoire elle-même, c’était son affaire et celle de ses compagnons.

Il écrivit à ses co-intéressés de Mexico des lettres multipliées et pressantes ; un homme sûr fut expédié à San Francisco pour aller chercher des renforts et des munitions ; un autre partit pour Mazatlan dans le même but ; enfin, le 23 septembre, toutes les mesures prises, la compagnie quitta le Saric et rétrograda vers Hermosillo.

Le 29 au soir, elle campait à San Lorenzo sur le Rio San Ignacio.