Page:La Mettrie - Œuvres philosophiques, éd. de Berlin, Tome second, 1796.djvu/118

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tirent pas plus chacun de fon côté , qu’une pauvre ame timorée par le fcrupule , & des nerfs , qui, fi on les laiflbit faire, imaginent qu’ils auraient bien du plaifir à le braver. De là , de cette fource empoifonnée , toutes ces contrariétés qui ont fait imaginer plufieurs âmes aux philofophes embarrafles de deviner l’énigme de l’homme ; de-là ces peines & ces combats , fi flatteurs pour la raifon & pour la vertu , quand elles peuvent par hafard faire pencher la balance de leur côté, & remporter la viéloire.

Plus l’éducation eft contraire à la nature , plus il en réfulte dans le courant de la vie d’incompatibilité entre les deux fubftances. La vaincre , cette contrariété , c eft le triomphe de l’homme , qui feul a ce pouvoir, comme je le dirai plus au long,lorfque j’aurai occafion de faire fentir combien l’homme, tout animal qu’il eft, eft cependant au-deffus de tous les animaux. Je ne négligerai pas de dire en paflant qu'il y a eu des philofophes > qui ont fingulierement expliqué cette bifarre contradiction de l’homme avec lui-même ;c’eft par la méprife des âmes, qui fe trompant de porte» entrent dans les corps qui ne leur conviennent pas, & laifTent là ceux qui leur étoient deftinés. Ce font ces étourdies , dit-on , qui font les gens diftraits , ceux qui prennent la femme d’autrui pour la leur , ceux qui fiflent, chantent, danfent, ou tournent le dos , au moment même qu’on répond aux quef-