Page:La Mettrie - L'homme machine, 1748.djvu/20

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DÉDICACE.

me ? Qu’eſt-ce que cette génération, cet enfantement d’Idées, que produit le goût de la Nature & la recherche du Vrai ? Comment peindre cet Acte de la Volonté, ou de la Mémoire, par lequel l’Ame ſe reproduit en quelque ſorte, en joignant une idée à une autre trace ſemblable, pour que de leur reſſemblance & comme de leur union, il en naiſſe une troiſième ; car admirez les productions de la Nature. Telle eſt ſon uniformité, qu’elles ſe font preſque toutes de la même manière.

Les plaisirs des ſens mal réglés, perdent toute leur vivacité & ne ſont plus des plaiſirs. Ceux de l’Eſprit leur reſſemblent juſqu’à un certain point. Il faut les ſuſpendre pour les aiguiſer. Enfin l’Étude a ſes Extaſes, comme l’Amour. S’il m’eſt permis de le dire, c’est une Catalepſie, ou immobilité de l’Eſprit, ſi délicieuſement enivré de l’objet qui le fixe & l’enchante, qu’il ſemble détaché par abſtraction de ſon propre corps & de tout ce qui l’environne, pour être tout entier à ce qu’il pourſuit.