Page:La Mothe Le Vayer - Œuvres, Tome 2, Partie 2, 1756.pdf/493

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C’est pourquoi les Grecs ont prononcé hardiment tantôt que ceux qui savoient les lettres voioient le double des autres,

Διπλούν ὁρῶσιν οἱ μαθόντες γράμματα, tantôt que celui qui manquoi de cet avantage, ne voioit goutte, lors mêmes qu’il croioit voir le plus clair.

Ὁ γραμμάτων ἄπειρος, οὐ βλέπει βλέπων. Et c’est encore le fondement de cette notable Sentence de Platon, Qu’il n’y a pas moins de difference entre une personne savante et celle qui ne l’est pas, qu’entre le Medecin et le malade : Aristippe disoit, qu’entre un cheval dressé et celui qui est indomté : Aristote qu’entre un homme vivant et un mort : Et Demades, qu’entre un Dieu, et un homme. Finissons ce petit éloge de la Science par le Proverbe Arabique, qui porte qu’un seul des jours d’un homme docte vaut mieux que toute la vie d’un idiot, lequel n’a nulle teinture d’érudition, ni de ce qu’on nomme ordinairement dans l’école, Discipline.

Si est-ce que les premiers hommes en connoissance de tous les siecles nous ont souvent fait peur de la Science, et nous l’ont représentée comme la plus vaine et la plus trompeuse de toutes les occupations que nous pouvons prendre. N’est-ce pas la leçon que