Page:La Nature, 1877, S1.djvu/408

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prochées des eaux et les plus communes, sont les seules dont les sédiments aient conservé des traces, mais ici les conditions qui présidèrent au dépôt, furent exceptionnellement favorables ; non-seulement la plage était accidentée et richement peuplée ; mais la montagne qui devait plus tard emprunter son nom à la victoire de Marius, dominait à l’est les eaux du lac de ses escarpements, et s’avançait même, à ce qu’il semble, en forme de promontoire, à l’endroit où s’élève aujourd’hui la butte, dite des Moulins-à-vent. C’est ainsi qu’à l’aide d’une rivière, dont l’embouchure a laissé des vestiges notables sur le même point et des affluents de cette rivière, certaines espèces montagnardes ou croissant alors au fond des bois et des vallons escarpés, ont pu venir jusqu’à nous ; l’existence de ces espèces n’est souvent attestée que par une feuille isolée, quelquefois même par uu organe léger et de faible dimension, mais de nature a être aisément porté par le vent jusqu’à une distance éloignée de son point de départ.

Fig 1. — 1-9. Conifères éocènes de la flore des gypses d’Aix. — 1-4. Callitris Brongnartii. Endl. (1. Rameau. 2-3. Fruit. 4. Semence. ) — 5-6. Widdringtonia brachyphylla, Sap. 5. Rameau. 6. Fruit. — 7-8. Juniperus ambigua, Sap, 7. Rameau. 8. Fruit. 9. Pinus Philiberti, Sap. — Cône.

Aux abords du lac gypseux se pressaient une foule de conifères dont les figures ci-jointes représentent quelques spécimens, choisis parmi les plus caractéristiques.

C’étaient des pins de petite faille, à ce qu’il semble, mais de formes variées et dont les rameaux, les cônes (voy. la figure du cône du Pinus Philiberti (fig. 1, n° 9), un des plus curieux par sa forme étroite et allongée) et jusqu’aux bourgeons et aux chatons mâles sont arrivés jusqu’à nous. Associés aux pins, on distingue de nombreux thuyas, d’affinité africaine (genres Callitris et Widdringtonia), et même un genévrier (Juniperus ambigua) analogue à notre Sabine, mais qui se rapproche surtout d’une sabine indigène en Asie Mineure et en Grèce, le Juniperus fœtidissima, Wild. Les fruits de l’espèce fossile, qui justifient ce rapprochement, ont été découverts tout récemment par M. le professeur Philibert ; ils sont relativement gros, et la figure qui le représente, pour la première fois (voy. fig. 1, nos 7 et 8), permet de juger de son aspect.

Parmi les formes devenues exotiques, associées autrefois aux conifères, aux abords immédiats du lac gypseux, trois types doivent surtout attirer l’attention. Le premier est celui des palmiers-éventail ou Flabellaria, dont l’espèce principale a été dédiée par M. Brongniart au naturaliste Lamanou, sous le nom de Flabellaria Lamanonis. Les frondes de cette espèce, dont les pétioles n’étaient pas épineux, mesuraient jusqu’à 1m,50 de longueur ; leur limbe se divisait en de nombreux segments ou rayons divergents. Lui et ses congénères de la flore d’Aix ne constituaient pourtant, à ce qu’il semble, que des arbres de petite taille, comparables par la proportion et l’aspect au palmier de Chusan ou palmier à chanvre, introduit de Chine et cultivé maintenant, comme plante d’ornement, dans les jardins du midi de la France.

Fig 2. — 1-2. Lomatites aquensis, Sap. — 3. Aralia multifida, Sap.

Le deuxième type ne se retrouve plus maintenant qu’aux Canaries, en avançant dans la direction du sud ; c’est celui des Dracœna ou Dragonniers, célèbres par l’épaisseur énorme que leur tige, d’ailleurs basse et trapue, peut acquérir à la longue, en donnant lieu à des subdivisions dichotomes plus ou moins nombreuses. Les feuilles des Dragonniers sont conformées en glaive et en tout analogues à celles des Yucca, si répandus dans nos plantations d’agrément. Les Dracœna de la flore d’Aix comprennent plusieurs espèces, dont une, au moins, se rapprochait par la taille de celle des îles Canaries. Cette espèce est le Dracœna Brongniartii, Sap., représenté dans