piété ce qui n’est pas fait pour des pas humains. Les dieux n’enjambent pas des marches si roides : leur vol les porte de l’une à l’autre.
Un souvenir traverse ma mémoire : est-elle venue ici, avec ses vierges compagnes, la jeune fille qui a fait courir les plus beaux jeunes hommes d’Athènes ? Dans la fameuse guerre d’Alcibiade, les Athéniens ont pris une petite ville, près de Ségeste, qui eut nom Hyccara. Ayant tué les hommes, ils ont emmené les plus jolies femmes captives ; et, dans le nombre, il en est une qui fut Laïs.
Non loin du temple, vit un gardien, berger des pierres, dans une espèce de hutte. Bon pâtre sans pipeaux, il n’appelle pas les colonnes à la promenade et ne joue pas de la flûte. La femme du brave homme est enceinte. Point de troupeaux aux champs sans promesse d’agneau. Pleins de bonne volonté l’un et l’autre, plus aveugles et plus soumis que les ronces du chemin, ils sont tout ce qu’il faut pour rappeler la vie du siècle dans cet espace olympien.
J’ai passé une nuit chez eux. Ils n’ont rien : à peine une miche épaisse, dure et sans sel. On meurt de faim, sur le tard de ces journées farouches. J’ai partagé mon pain frais et mes fruits avec eux ; ils m’ont donné de leur vin, lourd et dense, d’un sucre où l’on sent une vapeur de soufre.
Ils se rappellent, sans doute, qu’ils ont offert un lit de feuilles à un mendiant d’Irlande : je me donnais alors un nom, que ces bonnes gens, y eussent-ils mis cent ans d’étude, n’auraient jamais pu prononcer. Mais deux autres nuits, plus étincelantes que les strophes de Jessica et de son amant, je les ai menées, tantôt rêvant les yeux fermés, tantôt les yeux ouverts, entre les colonnes du