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V

Ce n’est pas assez de faire du domaine public le meilleur juge et le libraire par excellence ; on en fait un Midas qui change en or tout ce qu’il touche. Que les propriétaires consentent à ne pas jouir eux-mêmes de leurs propriétés, leur fortune est faite. Par un miracle qui ne s’est jamais vu, ce sont des étrangers qui, en se servant de notre bien, nous enrichiront. On n’offre, il est vrai, aux héritiers, en compensation de leur droit, qu’une prime de 2 ou 3 pour 100 sur le prix de chaque exemplaire, mais on ajoute : « Ces mille bras du domaine public vont saisir votre livre et le réimprimer partout et sans cesse. Ce mince droit de quelques centimes, multiplié par des milliers d’éditions, produira des sommes considérables. »

Ce n’est point pour les libraires que sont écrites ces belles promesses. C’est pour le public, qui ne peut guère connaître les secrets de la librairie et qu’on veut gagner à une mauvaise cause ; c’est pour le législateur, qu’on veut éblouir. Quoi qu’il nous en coûte, il faut bien mettre à nu les côtés faibles de la librairie, et dire ce qu’il y a de faux dans cette fantasmagorie.