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l’Arménie turque qu’en Cilicie. Dans les neuf vilayets suivants : Alep, Adana, Trébizonde, Erzeroum, Van, Bitlis, Diarbékir, Mamouret-ul-Aziz et Sivas, il y avait, d’après cette statistique, une population totale de 4.629.375 habitants ainsi répartis :

Musulmans : 3.619.625.
Arméniens : 726.750.
Autres chrétiens : 283.000.

Le consul britannique Trotter s’est servi de ces chiffres en les augmentant d'environ 25 % et quelques auteurs[1]ont adopté, à leur tour, ceux de ce fonctionnaire. Il convient de s’y arrêter pour savoir quel est le degré de créance qu’ils méritent.

Point n’est besoin de dire que, pour publier cette statistique, le Gouvernement ne s’est livré à aucun travail sérieux de recensement. Pas de doute, non plus, qu’il n’ait évalué le nombre des Arméniens aussi bas qu’il a cru pouvoir se permettre ; et quel scrupule pouvait arrêter, dans l’altération du chiffre vrai d’une population, un Gouvernement qui n’a pas hésité à tenter de supprimer cette population elle-même.

Il faut prendre d’ailleurs en considération que si, à cause du service militaire, qui était alors obligatoire pour les Musulmans, le Gouvernement turc pouvait posséder le chiffre, plus ou moins exact, de cette population, il lui était impossible de connaître le chiffre des non musulmans, parce que ces derniers, pour se soustraire au « bédéli askéri », dissimulaient leur nombre dans une proportion que des personnes bien informées, estimaient être de moitié au moins. On peut donc affirmer, sans dépasser les limites de la vraisemblance que, dans les neuf vilayets de l’Anatolie, le nombre des Arméniens, en 1880, était au moins le double de celui indiqué par le Gouvernement turc.

D’après la statistique publiée par le Patriarcat, en 1882, le nombre des Arméniens en Turquie, était de 2.660.000, dont 1.680.000 dans les six vilayets arméniens (Annexe I).

Y a-t-il exagération dans ce chiffre ? Nous sommes convaincus qu’il est aussi au-dessous de la vérité. En voici la démonstration officielle.

En 1884, pour rembourser les dettes contractées par le couvent arménien de St-Jacques, de Jérusalem, le Gouvernement turc, sur la

  1. Le major Trotter donne, pour les neuf vilayets, les chiffres suivants : Musulmans, 4.450.000 ; Arméniens, 908.000 ; autres chrétiens, 350.000. D’après Vital Guinet (La Turquie d’Asie), il y avait, dans les neuf vilayets, en 1890 : Musulmans, 4.450.000 ; Arméniens, 840.000 ; autres chrétiens, 630.000. Zélinof donne les mêmes chiffres pour les Musulmans, mais il évalue les Arméniens à 913.000 ; le professeur Supan (Petermann’s Mitteilungen, 1896, 42. Band), à 914.000 ; le professeur turcophile Vambéry (Deutsche Rundschau, Februar 1896), à 1.130.000 ; Lynch (L’Arménie), à 1.058.000.