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provinces et de faire à cet élément une part proportionnelle dans l’organisation de la justice.

Ici encore, d’ailleurs, se pose un certain nombre de questions dont la note ottomane ne laisse pas entrevoir la solution. Les juges seront-ils inamovibles ou désignés pour un temps déterminé ? D’après quelle loi jugeront-ils ? Sera-ce d’après le Chéri ? Sera-ce d’après un autre Code ? Comment les Cours d’assises feront-elles respecter leurs arrêts par les tribus Kurdes semi-indépendantes et tout à fait sauvages ? Cette dernière question prouve surabondamment combien il est nécessaire d’exclure les Kurdes de l’ensemble des réformes destinées aux populations de l’Arménie et de leur donner une administration séparée conforme à leurs mœurs guerrières et primitives. À l’occasion de cette même question des rapports des deux éléments sédentaires et nomades, les Soussignés expriment la conviction que toutes les servitudes ou corvées imposées par les Kurdes aux Arméniens, et qui dérivent, non pas d’un principe de droit, mais d’un abus invétéré, doivent être abolies.

Ils pensent également que le bénéfice de toutes les réformes stipulées au profit des Arméniens devrait équitablement être acquis aux nombreux Nestoriens qui peuplent le centre et le midi du Kurdistan (Caza de Djoûlamerk).

Il est regrettable que le paragraphe relatif au prélèvement d’une certaine somme destinée à subvenir à des besoins locaux tels que l’entretien des écoles, et l’exécution des travaux publics, ne soit pas rédigé en termes plus clairs. On peut admettre cependant qu’il renferme l’idée d’un principe financier d’une certaine valeur et ce principe, dans la pensée des Puissances, se poserait dans les termes suivants. Les taxes se diviseraient en deux catégories : la première, comprenant le produit des droits de douane et de l’impôt sur le sel, serait appliquée aux besoins de l’Empire. La seconde provenant des revenus généraux du vilayet, serait affectée en premier lieu aux services administratifs de la province. Une partie du surplus serait réservée pour les besoins locaux, et le reste envoyé à Constantinople. Si cette interprétation est exacte, la proposition de la note du 5 juillet correspondrait plus ou moins à l’article 19 du projet de réorganisation administrative des provinces de la Turquie d’Europe présenté par la Sublime Porte à l’examen de la Commission européenne de la Roumélie orientale. Elle constitue assurément une réforme sérieuse, en tant qu’elle consacre le principe qu’il doit être tout d’abord pourvu aux dépenses de la province au moyen d’un prélèvement opéré sur une partie du produit des impôts, mais il est essentiel que ce principe soit entouré de garanties identiques à celles adoptées par la Commission des Réformes administratives.

Les Soussignés doivent faire observer, en outre, qu’on ne peut pas affecter à tel ou tel autre usage des revenus qui sont déjà hypothéqués.

Le principe de la décentralisation, si nécessaire dans les provinces habitées par une population professant un culte différend de celui de l’autorité centrale, est traité d’une manière pou satisfaisante dans la note de votre Excellence. Il est impossible de compter sur des réformes efficaces aussi longtemps que la position des Gouverneurs généraux ne sera pas complètement modifiée. La note laisse bien entrevoir que leurs pouvoirs seront étendus et leurs fonctions garanties, mais les assurances d’un caractère