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dans la Turquie d’Asie, en y créant une espèce d’état tampon (novembre 1877). L’arrivée de l’escadre britannique devant Constantinople, en dissipant ses craintes, permit à la Turquie de revenir sur une décision que le désespoir seul lui avait dictée. Au cours des négociations de paix qui eurent lieu à San-Stéfano, elle repoussa le texte proposé par les plénipotentiaires russes et rédigé à la suite des sollicitations arméniennes. Dans la rédaction définitive de l’article 16 du traité de San-Stéfano, la formule « autonomie administrative » fut remplacée par celle de « réformes et améliorations » avec, pour garantie, l’occupation russe (Annexe B).

Au Congrès de Berlin, grâce au concours de la Grande-Bretagne, la Turquie parvint à faire supprimer aussi la clause de l’occupation russe. Les Arméniens, à ce Congrès, avaient demandé, cette fois en opposition ouverte avec le Gouvernement turc, une autonomie administrative (Projet du Patriarcat Arménien, Annexe C).

Cette demande ne fut pas prise en considération et c’est ainsi que l’article 61 du Traité de Berlin vit le jour (Annexe D). Tout espoir d’amélioration du sort des Arméniens était perdu et le silence se fit de nouveau sur eux.

La situation dans les provinces arméniennes devint alarmante. Les six puissances, par une note collective, remise à la Sublime Porte, exigèrent l’exécution des réformes promises. La note expliquait en quoi elles devaient consister (septembre 1880, Annexe E). La Porte laissa cette note sans réponse.

Quelques années se passèrent. Grâce à l’indifférence de l’Europe la persécution des Arméniens put être poursuivie avec une méthode et un esprit de suite pourtant rares en Turquie. Partout, en Arménie, les Arméniens étaient dépossédés de leurs terres. Dans leur désespoir, ils se soulevèrent à plusieurs reprises (Premiers événements de Sassoun, 1894). La Sublime Porte répondit par une répression sanglante et par des massacres.

Un moment, la conscience européenne et chrétienne se demanda si, de tout ce sang versé, une part de responsabilité ne pesait pas sur elle. La Grande-Bretagne, la France et la Russie exigèrent l’exécution des réformes que la Turquie s’était engagée à introduire dans les provinces arméniennes en vertu de l’article 61 du Traité de Berlin. Ces trois Puissances élaborèrent même un mémorandum (Annexe F) et un projet de réformes que la Porte repoussa (avril 1895, Annexe G). Elle leur communiqua celles qu’elle se disait décidée à mettre à exécution (Annexe H). Une mission fut envoyée à cet effet en Arménie, sous les ordres de Chakir pacha. Entre temps, les Arméniens faisaient une manifestation devant la Sublime Porte (septembre 1895). La police turque, informée d’avance, avait armé la population musulmane. Elle donna le signal des premiers massacres des Arméniens à Constantinople, qui furent bientôt suivis des grands massacres armé-