Page:La Revue blanche, Belgique, tome 2, 1890.djvu/479

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mets bien que l’auteur de l’Argent ne ferait pas le Bonheur,

M. Auguste Juvène. Pourquoi pas ? Voyez plutôt les Belges. Ils cumulent, les Belges.

M. Alexis Noël. Les Belges ! les Belges… Je ne vous parle pas des Belges.

M. Auguste Juvène. Vous avez tort : c’est la littérature de l’avenir. Ainsi Mæterlinck, quel dentiste ! Justement je suis en train, en ce moment, de mettre sa Princesse Maleine au pluriel : c’est splendide.

Moi. Mais,… pourquoi au pluriel, cher maître ? Je ne comprends pas très bien.

M. Auguste Juvène. C’est une adaptation en vue du public parisien. Et vous verrez l’effet produit. C’est prodigieux. Tenez, ceci, par exemple : —

 
» — Qui êtes vous ?
» — Nous sommes les princesses Maleine.
» — Comment ?
» — Nous sommes les princesses Maleine.
» — Quoi ? Vous êtes les princesses Maleine ?
» — Nous sommes les princesses Maleine. »

Hein ? Est-ce assez beau ? Et ce cri charmant ;

« Nourrices, nourrices, vous avez des soleils plein les mains. »

Et cette phrase terrible :

« Il y a des petits ga-arçons dé-érière les po-ortes »

Du reste, c’est à la scène qu’il faudra voir ça.

Moi. Mais, cher maître, ce faisant, êtes vous sûr de rester fidèle aux intentions de l’auteur ?

M. Auguste Juvène. Parfaitement. Mæterlinck est fait pour le pluriel : c’est la forme de son esprit. Du reste, lui-même, comment se nomme-t-il ? — Mæterlinck, et non pas Monterinck. Vous voyez bien.

M. Alexis Noël et moi. C’est juste.

Un silence.

Moi. Chers maîtres, il me reste une dernière question à vous poser. Reconnaissez-vous une analogie entre la chute du Naturalisme et celle de la Société des Dépôts et Comptes Courants ?

M. Alexis Noël. Ma foi…

M. Auguste Juvène. Comment « la chute du Naturalisme » ?