Page:La Revue blanche, t12, 1897.djvu/290

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rent jusqu’en 1877. Je crois que toutes les tentatives de restauration ne fussent probablement pas sorties des parlottes des ducs ou même de leurs rêveries, si elles avaient dû se heurter aux cent mille soldats républicains du 18 mars unis aux cent quarante mille électeurs de Barodet.

La seconde conséquence a été de remettre forcément l’œuvre de la constitution de la République aux mains des républicains parlementaires, de Gambetta rentré en juillet, des groupes libéraux de toutes nuances. Dès lors, puisque tout travail se localisait dans le Parlement, la République ne pouvait plus s’imposer et s’instituer que par les procédés, les tactiques, les concepts d’ordinaire en cours dans les assemblées. Au lieu d’être la large et enthousiaste clameur sortie des places publiques, la République fut le bulletin de vote des 368 consolidant la constitution Wallon. Toute la différence de l’institution républicaine a découlé de cette très différente origine. Le berceau fut déplacé et les vrais, les bons parrains manquèrent.

Mais si ces résultats immédiats ont été négatifs, la reculée que nous donne aujourd’hui le temps n’en permet que de mieux dégager les conséquences aussi fécondes que profondes qui découlent et découleront longtemps de la Commune dans notre histoire contemporaine.

À un point de vue élevé ces suites sont excellentes pour l’évolution républicaine qui s’annonce enfin.

Et tout d’abord, s’il est fâcheusement vrai que la mauvaise conduite des affaires de la Commune et sa chute ont nui au bon engagement de la République dans la voie, il faut dire au contraire à un point de vue moral, philosophique, historique, que par le sang de ceux qu’on doit appeler ses martyrs, la Commune a servi dans l’avenir et pour un long avenir la foi républicaine et sociale : les morts d’Avril et de Mai sont les héros d’un autre Nouveau-Testament. Pour affermir les dévouements, les provoquer, ces exemples joueront un rôle incomparable dans l’éducation de la démocratie du monde. Ceci est un autre genre de fondation républicaine, plus idéal, plus tardif, mais qui a sa puissance de fait aussi.

La Commune ensuite a donné aux revendications de la démocratie française et on peut dire aux démocraties de toutes les nations une orientation dont il ne sera guère dévié, au moins pour les lignes générales.

Elle a d’abord mis en première préoccupation l’idée communale s’exprimant par un gouvernement local qui, pour ne pas aller jusqu’à l’autonomie — ce qui entraînerait tout un remaniement par fédérations ou autre groupement plus ou moins approchant — n’en devra pas moins être très indépendant et très actif dans la sphère de tous ses services intérieurs et non pas seulement l’écolage, l’hygiène, mais la police et la finance. Tous les partis d’ailleurs, sauf le vieux parti opportuniste sont, je crois, d’accord sur la décentralisation — avec la gamme des nuances naturellement. Mais l’idée motrice et directrice est apparente.