Vous n’avez jamais essayé de forcer un coffre-fort ?… Hé bien c’est très dur. Et quand on s’est donné beaucoup de mal, savez-vous ce qu’on y trouve, dans les coffres-forts ? Des titres nominatifs, rien que des titres nominatifs, et parfois des papiers de famille, des cachets de douches sulfureuses, un livret militaire, et des cartes d’entrée périmées pour l’exposition du cercle Volney… C’est comme pour se faire entretenir par les femmes. Mais, mon cher monsieur, pour trouver une bonne place de souteneur, c’est aussi difficile que d’entrer au Conseil d’État.
Alors, il faut vous trouver quelque chose de plus facile.
S’il vous plaît.
Que diriez-vous du vagabondage ? De trois mois à six mois d’emprisonnement.
Va pour le vagabondage. Je suis vagabond stagiaire depuis quelques jours. Je vais passer vagabond en pied, vagabond officiel. Quelles sont les formalités ?
Mettez vos plus vieux habits.
J’ai mis les plus neufs… Mais ce sont les mêmes, entre nous… On dit que Georges Brummel ne voulait jamais mettre d’habits neufs, qu’il faisait porter les siens par ses domestiques, avant de les endosser. Brummel trouverait sans doute que j’ai un peu exagéré ses théories de dandysme. Regardez-moi ce veston, et cet aimable gilet gris, seul survivant d’un complet gris qui eut, ma foi, son heure d’élégance.
Hé bien, maintenant, il ne vous reste plus qu’à vagabonder.
Mais, malheureux, je ne fais que ça depuis quatre jours.
Et vous avez rencontré des agents ?
Si j’ai rencontré des flics ! Il n’en manque pas. J’en rencontre tous les quarts d’heure.
Et ils ne vous disent rien ?
Ils ne sont pas familiers… Non, je ne réussis pas à attirer l’attention des flics ; non plus d’ailleurs que celle des gendarmes. Car j’ai