Page:La Revue blanche, t12, 1897.djvu/661

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
DEUXIÈME AGENT

Tu la d’vines pas ?

PREMIER AGENT

Dis-la moi donc, fourneau. Quand j’te dis que j’suis pas exercé à d’viner.

DEUXIÈME AGENT

Mais tu les as sur toi, fourneau (Riant.) C’est tes bottes. C’est les deux bottes du sergent de ville.

PREMIER AGENT, grave

Ah ! celui-là n’est pas mauvais, Francis. C’en est un bon, celui-là, Tu vas me l’écrire sur un papier. Je veux le rapporter à Sophie.

(Ils s’approchent du banc.)
PREMIER AGENT

En voilà un qui fait des heures ! S’en paie-t-il de roupiller !

DEUXIÈME AGENT

Il dort dur. Tiens !

PREMIER AGENT

Qu’as-tu ?

DEUXIÈME AGENT

Il a la décoration.

PREMIER AGENT

Oui, et la bonne.

DEUXIÈME AGENT

La légion.

(Ils s’éloignent.)
PREMIER AGENT

C’est un vieux serviteur de la patrie. Il a dû faire campagne, ce vieux-là. Il a versé son sang sur les champs de bataille.

DEUXIÈME AGENT

Et le voilà dans la purée.

(Après réflexion :)

C’est une belle chose tout de même que la légion.

PREMIER AGENT

Oui, ça fait rudement bien sur une tunique. Ah, c’est une belle affaire, que ce ruban rouge !

DEUXIÈME AGENT

Oui, mais y en a bien qui l’ont eu pour de l’argent.

PREMIER AGENT

Hé bien, ça prouve que c’est des gars qui ont de l’argent.

DEUXIÈME AGENT

Et puis, qu’y en a donc que c’est leur femme qui leur a fait obtenir ça, en allant voir les ministres !