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le « tourniquet »
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— Pour ne pas marcher assez vite au pas accéléré ;

— Pour ne pas courir au pas gymnastique ;

— Pour tomber à terre assommé par la fatigue, le soleil, étouffé par le barda[1]


Au peloton immobile on fait refuser :

— Pour se déranger du garde à vous en se reposant sur une jambe ;

— Pour déranger le canon du fusil de la position verticale dans le deuxième mouvement de présentez armes, lorsqu’il y a dix, quinze minutes, et quelquefois plus, que le soldat est dans cette pose ;

— Pour laisser tomber la pointe de la bayonnette dans le deuxième mouvement d’en avant pointez : dans les troisièmes mouvements d’en tête parez et pointez et de coup lancé, lorsque le soldat garde cette pose depuis trois, quatre, cinq et même six minutes ;

— Pour se redresser sur les jarrets lorsqu’il y a une demi-heure ou trois quarts d’heure qu’il fait l’escrime à la bayonnette sur place ;

— Pour ne pas détendre les bras assez rapidement et assez vigoureusement dans les mouvements de l’assouplissement avec armes, lorsqu’il a exécuté cent ou cent cinquante mouvements de cette manœuvre.


Refus de se taire. — Ensuite vient par ordre de fréquence le refus de se taire.

Un gradé donne à un disciplinaire un ordre obscur, mal expliqué, inepte ou impossible à exécuter ; le disciplinaire demande des éclaircissements, fait des observations ou risque une ironie, l’ordre formel vient lui clore la bouche ; s’il ajoute, ne fût-ce qu’un mot, après le troisième ordre : refus d’obéissance.

Le refus de se taire reçoit une interprétation toute spéciale dans son application aux punis de cellule.

Lorsqu’un sergent ou un caporal de garde veut faire tourner un puni de cellule pour refus de se taire, il s’y prend ainsi :

Il oublie de donner à l’encellulé soit sa gamelle, soit de l’eau, soit du pain, soit le tout à la fois.

L’homme frappe sur sa porte, appelle, crie.

Profitant d’un moment où le bruit des heurts et des cris empêche le disciplinaire d’entendre, le gradé place deux témoins sous la lucarne de la cellule et du dehors, donne trois fois l’ordre formel de se taire ; si le disciplinaire, n’entendant pas, continue à crier ou à frapper, il est en prévention de conseil.


Refus de baisser les yeux. — Le service intérieur prescrit que lorsqu’un inférieur parle à un supérieur, il doit le regarder fixement ;

  1. Nom donné par les troupiers d’Afrique au chargement du soldat. Ce mot vient de l’arabe et signifie bât.