Page:La Revue blanche, t27, 1902.djvu/378

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pliquent pas un abus d’autorité, une tyrannie, une contrainte, une violence, un arbitraire physique ou moral.

C’est assez vous dire que je répudie les tendances misogames et misogynes de Tolstoy, tout comme je déplorais son vandalisme et son puritanisme. Seule une réconciliation complète de la chair et de l’esprit, rendra à l’humanité une partie de ce bonheur et de cette joie dont la privèrent les doctrines du Christ ou plutôt celles de saint Paul, le « vilain petit Juif », comme l’appela Renan.


De M. Enrico Ferri, Rome.

Les affirmations de Léon Tolstoy, sur la « chasteté absolue » ne sont qu’une confirmation de la théorie de Morel et Lombroso sur les tares dégénératives des hommes de génie.

En effet, la pratique de la chasteté absolue serait la mort de l’humanité, puisque, malgré les miracles qui s’accomplissent dans les laboratoires chimiques, il est un peu difficile de penser qu’on arrivera jamais à fabriquer, par synthèse chimique, l’homunculus !…

Du reste, ces affirmations sont profondément anti-sociales et je dirai même immorales, malgré les bonnes intentions du célèbre écrivain, qui s’est monoidéisé sur la grande et sympathique figure de Jésus de Nazareth, dont, cependant, personne ne sait s’il a réellement été d’une chasteté absolue.

Les besoins fondamentaux de la vie humaine et, partant, les pivots de toute moralité humaine, ce sont : le pain et l’amour.

Le pain — qui est la conservation de l’individu.

L’amour — qui est la conservation de l’espèce.

Prêcher la chasteté absolue, c’est aussi anti-humain que prêcher le jeune absolu.

Cependant, dans toute erreur des hommes de génie, il y a toujours un noyau de vérité.

Et la vérité, relative et positive, des affirmations absolues de Tolstoy est dans les dommages et les ravages des excès sexuels, surtout chez les peuples latins, méridionaux, etc.

J’ai bien souvent regretté, moi qui ai été, en 1878, étudiant à l’Université de Paris, la vie de débauche à laquelle, pendant trois ou quatre années, se donnent un si grand nombre d’étudiants de cette noble et chère France, qui voit ainsi se neurasthéniser ses classes dirigeantes.

Et en Italie !… Nos meilleurs artistes et savants et travailleurs intellectuels, après un premier éclat magnifique, s’éteignant peu à peu par les exès sexuels.

L’ignorance où on laisse presque toujours les jeunes gens, en matière de physiologie et d’hygiène sexuelles, les empêche de distinguer entre le besoin normal, sain et fécond de l’amour et les excitations d’une, fantaisie sexuelle maladive et qui n’est que l’effet d’une faiblesse nerveuse irritable. Et ils s’abandonnent à une vie d’épuisement et d’abêtissement qui obscurcit l’intelligence et surtout paralyse la volonté. La faiblesse de volonté est, en effet, l’héritage fatal de cette sorte d’excès, et c’est la fai-