Page:La Revue blanche, t27, 1902.djvu/437

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si tendrement à une occupation ; que rien, à mon avis, ne donnait autant d’essor à l’activité intellectuelle que d’alimenter une batterie et de cribler des déchets ; que rien ne stimulait tant les facultés morales que la distillation des lingots et le lavage des couvertures ; — pourtant que je me voyais obligé de demander un plus haut salaire.

Il répondit qu’il me payait 10 dollars par semaine et qu’il trouvait la somme rondelette. Combien est-ce que je voulais ?

Je dis qu’environ quatre cent mille dollars par mois, logé et nourri, était tout ce que je pouvais raisonnablement exiger vu la dureté des temps.

On me mit à la porte. Et pourtant, quand je me remémore cette époque de ma vie et que je considère la dureté du travail que j’accomplissais dans cette usine, mon seul regret est de ne pas lui en avoir demandé sept cent mille.

Peu de temps après je commençai à me toquer, ainsi que le reste de la population, de la mystérieuse et miraculeuse mine de ciment et à faire mes préparatifs pour aller à sa recherche

CHAPITRE XXXVII
La mine de ciment Whiteman. — Histoire de sa découverte. — Expédition secrète. — Aventure nocturne. — En détresse. — Échec et congé d’une semaine.

C’était quelque part autour du lac Mono que gisait, supposait-on, la merveilleuse mine d’argent Whiteman. De temps en temps le bruit courait que Whiteman avait traversé l’Esméralda à la dérobée, au cœur de la nuit, sous un déguisement, et cela nous jetait dans un état de surexcitation extrême — parce qu’il devait être sur la piste de la mine inconnue et que le moment était venu de le suivre. Moins de trois heures après l’aube, tous les chevaux, mulets et ânes du voisinage étaient achetés, loués ou volés, et la moitié de la population en route pour la montagne, dans le sillage de Whiteman. Mais lui, circulait par gorges et montagnes pendant des journées au hasard, jusqu’à ce que les provisions des mineurs fussent épuisées et qu’ils fussent obligés de retourner chez eux.

La tradition rapportait qu’au début de l’émigration, plus de vingt ans auparavant, trois frères, des Allemands, survivants d’un massacre indien dans la prairie, marchèrent à l’aventure par le