Page:La Revue blanche, t28, 1902.djvu/364

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— Attends, mon ami, que j’allume la lampe,

La Vieille, couchée dans l’autre lit, avec son bonnet de vieille et sa tête confite, dégagea les couvertures, s’accorda, et rejeta d’un coup le sommeil.

— Tu es donc revenu, mon petit ?

Le Vieux racontait alors :

— Je me suis dit : Ils ne savent pas le prendre, cet enfant. Mais pour moi, il ne peut pas s’en aller comme ça. Et je préparais ton retour.

C’était une lampe fumeuse et sans verre, dont le feu sautait pour un rien, semblait une boule troublée, puis rentrait au repos.

Il dit encore :

— Est-ce que tu retournes chez eux ?

— Non, non, non ! répondit Jean.

— C’est à quoi j’avais pensé, dit le Vieux. Il faut que je me couche parce que j’attraperais froid et puis je te parlerai tout aussi bien une fois dans le lit.

Le pompon de son bonnet se tenait tout droit, participait de la forme d’une flamme et de la nature du coton. Jean riait déjà :

— Tu as donc le bonnet-crétot ?

— Ma foi oui, j’ai le bonnet-crétot. Et puis je te réponds qu’il est raide.

La chambre blanchie à la chaux vacillait autour de la lampe, et l’ombre tendait vers les angles un frisson de ses grands doigts. Le Vieux se mit au lit. On entendit le craquement des quatre pieds, la paix se calait et trouvait son aplomb.

— Il n’y a que ça à faire : Tu vas te coucher à la place de la Vieille et la Vieille viendra se coucher avec moi.

La Vieille sortit les bras et dit :

— Oui, mon petit. C’est comme ça qu’il faut faire.

Elle se levait alors parce qu’elle aimait mieux le travail fait. Le Vieux s’écria :

— Et puis, pas craindre qu’il se passe quelque chose. Je ne suis plus bon à rien.

Elle avait deux épaules maigres de vieille et ne comprenait pas toujours la plaisanterie.