Page:La Revue blanche, t29, 1902.djvu/56

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

exemple, le discours de M. Waldeck-Rousseau du 20 janvier 1902) que la police des mœurs n’existe plus, que les brutaux agents des mœurs sont remplacés par de paternels gardiens de la paix, alors qu’on a simplement changé leur dénomination en les rattachant à la police municipale sans changer leur mode de recrutement, et qu’on a augmenté leur nombre du contingent tout entier des agents cyclistes.

Ils déclarent qu’on va démolir Saint-Lazare et prévoient déjà les crédits de sa reconstruction en un lieu mieux isolé ; et à Saint-Lazare même on construit de nouveaux ateliers pour les filles.

Ils déclarent indéfiniment que le système actuel n’est que provisoire et ils en aggravent continuellement les formalités dolosives : telle la prescription des photographies sur les cartes, dont nous parlerons plus loin.

La question de la police des mœurs traverse en ce moment une phase intéressante. En effet, jusqu’ici toutes les tentatives faites par la police pour obtenir la consécration légale de ses actes d’arbitraire ont complètement échoué ; or une Commission extraparlementaire vient d’être nommée avec mission d’étudier la question — pourtant bien éclaircie — et de proposer des mesures légales.

La conférence internationale de Bruxelles, qui met en présence abolitionnistes et réglementistes et se réunit tous les trois ans, doit, ayant déjà voté en 1899 des conclusions contraires à la doctrine médicale des règlements, se réunir de nouveau, du 1er  au 6 de ce septembre et proposer, elle aussi, des mesures légales.

Nous estimons que toute mesure légale ajoutée au droit commun qui punit l’attentat à la pudeur, le détournement de mineur ou l’excitation de mineur à la débauche, ne ferait que consacrer en le déguisant le système actuel.

Les lois existantes (art. 331 à 334 du Code pénal, articles 1382 et suivants), et d’autre part, l’observation des mesures concernant le désordre ou le scandale sur la voie publique, suffisent amplement en l’espèce. On s’en contente en Grande-Bretagne et dans beaucoup de grandes villes du continent et le nombre des cas vénériens y diminue.

Observons sur le vif les procédés actuels de la police.

Des agents en « bourgeois », — qui, en dépit des soins que la préfecture prétend donner à leur recrutement, sortent tout simplement de l’armée ou du corps des gardiens de la paix dont ils ont été éliminés par des mesures disciplinaires, ou des brigades de sûreté, — parcourent jour et nuit les rues, les places, les établissements publics, les gares, à l’affût des filles notoirement connues d’eux, ou bien des racoleuses non encore inscrites, des petites ouvrières sans travail qui fréquentent les bancs des promenades publiques et qu’ils ne manquent pas alors de racoler eux-mêmes pour leur enlever tout moyen de protestation, voire même des enfants de douze ans qui leur paraissent désœuvrées, qu’on reconnaît vierges à la violation officielle du dispensaire et