Page:La Revue blanche, t30, 1903.djvu/279

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mune aucune législation particulière ne pourra l’atteindre, ni entraver son action.

Des marins-pêcheurs il n’est pas question dans cette affaire. La vérité c’est que plus de la moitié des marins inscrits, ne trouvant plus à s’embarquer sur des voiliers, ont demandé des ressources à la pêche côtière. Il a fallu construire de nouvelles barques, et l’impulsion donnée à cette construction a été telle que les ports de l’Ile d’Yeu, de Saint-Gilles, de Noirmoutier, des Sables, en Vendée, de Belle-Ile, du Croisic, de Groix, d’Auray, d’Etel et de Lorient, en Bretagne, qui possédaient naguère peu ou point de chalutiers en ont maintenant des milliers. Aussi les fonds, depuis Belle-Ile jusqu’à Bayonne, sont-ils labourés jour et nuit, par les chaluts qui les ravagent et les épuisent. Sans doute un certain nombre de pêcheurs bénéficient eux-mêmes et momentanément de cet état de choses, mais ce qui se passe actuellement en Bretagne montre assez que cet état de choses est proprement désastreux.

Au surplus d’autres causes de destruction sont venues s’ajouter à celle du chalut à vapeur : le filet traînant à petites mailles pour la pêche à la crevette est également pernicieux au frai et au petit poisson.

M. Maraud, ancien pilote, membre d’une commission chargée d’examiner la question de savoir s’il conviendrait d’interdire le chalut à chevrettes, déclare :

Pendant une journée il a été capturé 8 litres et demi de fretin, soles, rougets, dorades, plies, raies, merlans, etc. formant environ un millier de sujets sans compter une quantité presque égale d’un fretin trop menu pour être ramassé ou retiré des mailles. Après chaque coup de drague, et le triage opéré, ces petits poissons ont été mis dans un seau d’eau de mer, et il a été reconnu que la plupart étaient morts.

D’autre part le sous-commissaire de Saint-Gilles, appelé, à donner son avis, s’exprimait en ces termes :

Incontestablement le chalut à chevrettes détruit par sa nature, les moments et les lieux où il est employé, une quantité énorme de menu fretin. Pas un homme de bonne foi ne peut le nier. Il est donc incontestable qu’il contribue pour sa part à amener le dépeuplement de plus en plus appréciable de nos fonds. C’est donc un filet à proscrire même dans l’intérêt de ceux qui s’en servent et qui, pour le gain du moment, détruit et gaspille les réserves de l’avenir.

Enfin le commissaire de l’Inscription maritime de Noirmoutier, consulté sur le même sujet, répondait :

Cet engin étant à petites mailles est pour le fretin une grande cause