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Page:La Revue de l'art ancien et moderne, Tome XXXI, Jan à Juin 1912.djvu/352

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adorait à genoux ; et c’est en pleine Renaissance vénitienne que Véronèse nous fait vivre en présence du Portrait de la belle Nani : l’art n’est il pas l’amour souverain, puisqu’il est réellement plus fort que la mort et qu’il peut seul transmettre à l’avenir, dans sa tonalité d’ambre et de gris ardoisés, la grâce auguste de cette beauté blonde, jadis exaltée par les
P. Véronèse. — Portrait de la belle Nani.
épitres de l’Arétin ou les sonnets de Porchini ? Comme le style de ces poètes amis des belles et des peintres, la palette italienne a son dialecte vénitien : Véronèse le parle avec la simplicité largement lumineuse qui retiendra les coloristes, depuis Watteau jusqu’à Delacroix ; et, pour venir jusqu’à nous avec sa splendeur et ses perles, l’image de cette grande dame n’a quitté la maison Nani que pour recevoir l’hospitalité de l’abbé Celotti, du marquis Orlandini, du prince Demidoff, vers le milieu du siècle dernier, dans cette galerie de San Donato d’où proviennent également une Déposition de Rubens et l’un des plus frais portraits de la jeunesse de Rembrandt, qui vont nous retenir.

Alors que l’Italie du XVIIe siècle veut concilier l’enveloppante innovation du clair-obscur avec le souvenir du grand style qui persiste dans les nus mythologiques de Francesco Furini, Rubens colore tout de son